Chaque année, la tuberculose tue plus d’1,7 millions de personnes dans le monde et génère environ 9 millions de nouveaux cas notamment en Afrique Sub-saharienne, faisant de cette maladie pourtant curable, une des plus ravageuses.

Si l’incidence de la tuberculose reste globalement stable depuis 2005, la situation en Europe et plus particulièrement en Europe de l’Est, est préoccupante. Après avoir connu jusqu’en 2007, une diminution constante du nombre de nouveaux cas, l’OMS constate aujourd’hui une recrudescence de nouveaux cas de tuberculose en Europe, avec l’émergence de formes multi-résistantes et ultra-résistantes.

Le taux de prévalence de la tuberculose multi-résistante (MDR-TB) atteint aujourd’hui son plus haut niveau.

Sur les 9 millions de cas annuels de tuberculose, 500 000 (soit 5% des cas) sont des cas de tuberculose multi-résistante.

La tuberculose est qualifiée de multi-résistante (TB-MDR), dès lors qu’elle résiste aux deux anti-tuberculeux les plus efficaces, l’isoniazide et la rifampicine. Les cas de tuberculose multi-résistante, qui se propagent également de personne à personne, se développent notamment lorsque les traitements sont inadaptés ou mal suivis.

Les médicaments de deuxième ligne existant pour traiter la tuberculose multi-résistante sont jusqu’à cent fois plus coûteux que les médicaments de première ligne, utilisés pour traiter la tuberculose classique.

Le traitement préconisé pour enrayer les formes multi-résistantes, dure deux ans contre six à huit mois pour celui d’une tuberculose classique et entraine davantage d’effets secondaires.

L’ampleur réelle du développement des pharmaco-résistances reste mal documentée. Seuls six pays d’Afrique sub-saharienne ont pu fournir des données, dont le Rwanda qui présente la proportion de tuberculose multi-résistante la plus élevée avec 3,9% des cas recensés.

Ce sont les pays de l’ex-URSS (Europe Orientale et Asie Centrale) et la Chine qui enregistrent les taux les plus importants de tuberculose multi-résistante.

22,3% à Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan ;

19,4% en République de Moldavie ;

16% dans le Donetsk en Ukraine ;

15% dans Oblast de Tomsk (Fédération de Russie) ;

14,8% à Tachkent, capitale de l’Ouzbékistan ;

7,5% en Mongolie Intérieure, Chine.

Aujourd’hui, il apparaît une nouvelle forme de tuberculose dite ultra résistante (XDR-TB).

La tuberculose est considérée comme ultra-résistante (XDR-TB) lorsque, en plus de la résistance aux traitements de première ligne, s’ajoute une résistance aux molécules de la famille des fluoroquinolones (traitements de deuxième ligne). Dans ce cas, les options de traitement sont sérieusement limitées réduisant les chances de guérison du patient.

On observe aujourd’hui environ 40 000 cas par an de tuberculose ultra-résistante dans le monde.

Selon le récent rapport de l’OMS « Anti-Tuberculosis Drug Resistance in the World », sur 81 pays étudiés, 45 pays ont enregistré des cas de tuberculose ultra-résistante. Les pays d’Europe de l’Est et d’Asie Centrale enregistrent le plus grand nombre de cas de tuberculose ultra-résistante avec dans certains pays, des situations extrêmement préoccupantes où les formes ultra-résistantes peuvent représenter un quart des tuberculoses multi-résistantes (Estonie).

L’OMS souligne qu’il existe également une corrélation forte entre l’infection à VIH/sida et la tuberculose multi-résistante.

D’après des enquêtes menées en Lettonie et dans le Donetsk en Ukraine, la proportion de tuberculose multi-résistante est près de deux fois plus élevée chez les patients infectés également par le VIH/sida. Les personnes séropositives au VIH, en raison de leur immunité affaiblie, ont un risque accru de contracter une tuberculose ultra-résistante dans les zones géographiques où elle est particulièrement active.

Le déficit de financement est actuellement 2,5 milliards US$ dont 500 millions US$ pour les formes multi-résistantes et ultra-résistantes.

Il est indispensable que les gouvernements des pays concernés s’engagent sans plus attendre, à combattre activement la tuberculose sur leur territoire et que les pays donateurs s’engagent à soutenir financièrement encore davantage la prise en charge de la tuberculose et les programmes de recherche sur cette maladie. Il est urgent de disposer de schémas thérapeutiques simplifiés et accélérés contre toutes les formes de tuberculose, d’outils diagnostiques rapides et sûrs pour détecter rapidement les cas de tuberculose et de nouveaux vaccins efficaces pour prévenir la tuberculose à tous les âges de la vie. Des progrès sont indispensables à réaliser pour mieux contrôler l’épidémie.

Le Fonds Mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme est le principal financeur de la lutte contre la tuberculose dont il assure à lui seul près de 60% des financements.

Les critères d’éligibilité aux financements du Fonds Mondial reflètent le développement économique des pays. Ce sont les mêmes que ceux utilisés par la Banque Mondiale qui présentent l’inconvénient d’être très volatiles et défavorables aux économies à revenu « intermédiaire élevé » ce qui est notamment le cas de plusieurs pays d’Europe de l’Est et d’Asie Centrale. Les changements de classification ont un impact potentiellement dramatique sur le financement des programmes de lutte conte les épidémies dans la mesure où ils peuvent priver un pays de l’octroi de financements par certains organismes internationaux.

A partir de 2008, près des deux tiers des 22 pays d’Europe de l’Est et d’Asie Centrale qui mettent en œuvre des programmes financés par le Fonds mondial, ne seront plus éligibles ou verront leur éligibilité aux financements internationaux fortement menacée. Les financements accordés à l’ensemble de ces pays par le Fonds mondial pour des programmes en cours représentent plus de 500 millions US$.

Faute de pouvoir augmenter les financements nationaux destinés à la lutte contre les épidémies notamment de sida et de tuberculose, ou d’attirer de nouveaux donateurs, ces programmes seront interrompus provoquant ruptures de traitement, arrêt des actions de prévention et accélération de la croissance des infections.

Il importe donc d’agir très rapidement pour trouver les solutions qui permettent à ces pays de faire face efficacement aux épidémies sans mettre en péril la continuité des traitements et des actions de prévention proposés aux patients.

L’OMS estime à plus de 4,8 milliards US$ les financements nécessaires pour lutter efficacement contre la tuberculose dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire, et qu’au moins 20% de ces fonds devraient être consacrés aux formes multi-résistantes et ultra-résistantes de la tuberculose.